Une première pour moi, je vais à l'opéra Garnier, jamais mis les pieds. Et j'y entraîne ma douce.
Pour ceux que je drope et boxe j'ai ajouté les trois pages KOBBE qui accompagnent l'écoute et donc racontent l'histoire.
Parlons-en de l'histoire avant de parler de moi. Un marin mal intégré dans son village, marginal. Suivant notre regard et les moments de l'histoire le personnage oscille entre farouche, indépendant et asocial. Parce qu'ils ont été bloqués en mer durant trois jours, son mousse est mort de froid, l'opéra commence au jugement, le verdict accepte l'accident et le juge de préciser:
Votre apprenti est mort dans des circonstances accidentelles. Mais c'est précisément le genre d'accident que les gens savent se rappeler
Brrrr.
Son deuxième apprenti, malmené physiquement et moralement, effrayé par Peter Grimes tombera d'une falaise et s'écrasera comme une m... (Ai je un talent pour le livret d'opéra?)
Le village, furieux, poussera Peter Grimes au suicide en mer. (Wiki est mieux, mais j'ai ma fierté)
À moi: Quand je découvre le thème de cet opéra, j'ai de suite pensé à cette dureté trouvée dans d'autres fictions qui se déroulent en Grande-Bretagne: "Jude l'Obscur" "Tess" "Barry Lindon", les moments dramatiques ou tragiques ne génèrent pas de pathos, plus insensible que fataliste. Je continue à me demander si je ne tourne pas autour de la définition du caractère Anglais avec un A majuscule.
Et la musique? C'est mon premier Britten, suffisamment populaire pour que je m'y frotte. Période où j'explorais et n'écoutais pratiquement que de l'opéra.
Encouragé par mes premiers éblouissements je voulais faire le tour du genre, m'imposais quelques écoutes de prise en oreille pour atteindre la révélation, quitte parfois mais rarement me heurter à mon incapacité d'accéder au graal.
Britten a été et est un bonheur. Les interludes comme premières rencontres; ici mises bout à bout.
Dans l'opéra, réparties, elles offrent d'abord du contemplatif avant de nous replonger dans la tension de plus en plus palpable.
Et puis il y a ce moment magique, ce morceau de musique qui entre définitivement dans ma vie. Chanté par John Vickers, à 3mn20 du début "In Dreams..." l'instant qui fait monter les larmes.
En rêve, je me suis bâti un foyer plus doux,
Chaud à mon coeur et d'un calme doré,
Où il n'y aura plus ni frayeur ni tempête.
Elle oubliera vite ses façons de maîtresse d'école,Et les labeurs de ces jours pénibles. Enveloppéede tendresse comme une brume de septembre.Les savants à leurs livres n'ont pas plus deSagesse que nous n'en aurions derrière notre porte,Et, à côté de nous, le riche serait pauvre.J'ai vu dans les étoiles la vie que nous aurions:Fruits au jardin, enfants sur le rivage,Un seuil tout peint de blanc et le coeur d'une femme.Mais le rêve construit ce qu'il peut abattre.Des doigts morts se tendent pour tout détruire.J'entends ces voix, qui refusent de s'éteindre,Crier "Il n'y a pas de pierreDans les flancs de la terre, dont tu bâtiras un foyerOù tu pourrais vivre tranquille"
Et voilà comment fini mon papier et Peter Grimes ...
Sans cesse en mouvement, la marée va et vient.Montante, elle remplit généreusement le chenal,Puis, d'un élan puissant et majestueux,Se retire, toujours terrible et mystérieuse.