Sur ce fleuve, un trajet que j'ai pensé troquer contre un bout de chemin sur terre...
Le monsieur, je l'ai longtemps repoussé (mesurés en semaine de postabilié).
Je ne suis pas le seul à le dire, ici on parle de "Froideur de musique, incapacité à swinguer", là "Conceptions savantes"
Et c'est vrai que mes premières écoutes pour préparer mon texte furent infructueuses. Du moins, si une vibration fut enregistrée, elle l'était bien en profondeur dans un lobe de sécurité pour que le temps ne se perdent pas. Comme une réserve d'émotion que je ne pouvais encore appréhender.
Haaaa, mon bon cerveau qui sait me ménager le temps pour en profiter plus tard.
Justement.
Pour démontrer sa capacité au swing, il y avait ce conseil lumineux de commencer par ses prestations en public.
Quelques chouettes titres du "Live At The Cafe Bohemia" pour se mettre en bouche, dans un climat musical qui m'est maintenant familier, et puis une oreille attentive mais détendue pour le jeu pianistique.
Et l'on peut gentiment enchaîner sur SON orchestre où ici encore il prouve qu'il est un des grands maîtres de l'improvisation.
Je profite pour vous faire apprécier ce que improvisation peut dire quand il s'agit, par exemple, de reprendre un classique chanté avec émotion par Billie, repris pour mon grand plaisir à l'époque où j'ignorais tout du jazz par Brian Ferry.
001. Billie Holiday - Billie Holiday-The Legacy 1933-1958 Disc 3 - You Go To My Head
002. Bryan Ferry - Let's Stick Together - You Go To My Head
001. Lennie Tristano - Lennie Tristano Quintet - Live In Toronto 1952 - You Go To My Head
Je lis de lui
Son art singulier est fondée sur l'analyse rigoureuse du discours des grands improvisateurs: Louis Armstrong, Earl Hines, Roy Eldridge, Charlie Parker, Bud Powell...
Je devinais bien là, que l'approche devait être différente, lente jusqu'à ce moment magique. La récompense.
Deux phrases ont retenues mon attention, oui je suis attaché à la lecture de ceux qui se passionnent, ils m'ont donné des clés d'écoutes pour avancer plus rapidement. En tout cas pour Lennie cela a fait presque l'objet d'une révélation en donc deux temps
Premier temps, une accroche pour écouter un titre, nous approchons là de la nature même du maître:
Il développe aussi d'une manière tout à fait naturelle, son phrasé de main gauche, jusqu'à obtenir une indépendance prodigieuse des deux mains et improviser avec une rigueur contrapuntique sans équivalentLe titre "C Minor Complex 1962". Qui est présent sur le disque New Tristano, titre qui a disparu sur la fusion en un seul CD de "Lennie Tristano" & "The New Tristano".
Ce titre je le retrouve, je vous le place dans le lien, et j'écoute.
J'ai un flash, comme une réponse à une question dont je n'avais pas eu de réponse en forme d'écoute.
Je reviens sur ma lecture et, confirmé par écrit
En réalité, son attachement à l'héritage de Bach le conduit à développer un phrasé d'une grande précision qui n'altère en rien la spontanéité de l’improvisation à quoi, plus que quiconque, il est attaché.Cette fameuse filiation entre le Jazz et Bach, souvent entendu, souvent répondu avec précision (Voir la réponse de PascalGeorges faîtes à une occasion) mais jamais ressenti vraiment.
Mais soudain, là. Écoutez, sentez et tremblez de bonheur quand enfin l'image se dessine:
001. Johann Sebastian Bach - Well-Tempered Clavier Book 2 (Glenn Gould) Cd1 - Prelude And Fugue No. 10 In E Minor Bwv 879 - I. Prelude
000. Lennie Tristano - Lennie Tristano-The New Tristano - C Minor Complex
002. Johann Sebastian Bach (Pierre Fournier) - Bach Six Solo Cello Suites - Suite No.5 In C Minor -Vi- Gigue
C'est aussi comme ça que je l'aime ma musique, c'est quand elle fait son truc, sans tenir à me séduire, m'intriguer tout au plus, me laissant approcher sans se présenter. Un peu orgueilleuse, heureusement des connaissances, me chuchotent quelques mots à l'oreille, m'entraîne ici et là, puis me laisse dans cette solitude d'écoute heureuse, active, concernée puisant enfin dans cette cave à émotions où furent rangées pour un temps quelques lignes que je n'avais pas su entendre mais qui enfin sous ma lumière....
Ensuite c'est tout un corps qui vibrent de bonheur, quand intellect, spirituel et émotionnel fusionnent.
Lennie Tristano et moi (non, pas sur la commode) c'est encore bien la preuve qu'il ne faut pas qu'écouter ses émotions pour juger, il faut faire confiance, écouter, revenir, patienter, espérer.
Et parfois....
A vous
001. Lennie Tristano - Live At The Cafe Bohemia - What Is This Thing Called Love
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002. Lennie Tristano - Live At The Cafe Bohemia - Medley- Body And Soul-sweet Lorraine
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003. Lennie Tristano - Live At The Cafe Bohemia - Subconscious-Lee
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001. Billie Holiday - Billie Holiday-The Legacy 1933-1958 Disc 3 - You Go To My Head
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002. Bryan Ferry - Let's Stick Together - You Go To My Head
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001. Lennie Tristano - Lennie Tristano Quintet - Live In Toronto 1952 - You Go To My Head
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002. Lennie Tristano - Lennie Tristano Quintet - Live In Toronto 1952 - 317 East 32nd
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001. Johann Sebastian Bach - Well-Tempered Clavier Book 2 (Glenn Gould) Cd1 - Prelude And Fugue No. 10 In E Minor Bwv 879 - I. Prelude
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000. Lennie Tristano - Lennie Tristano-The New Tristano - C Minor Complex
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002. Johann Sebastian Bach (Pierre Fournier) - Bach Six Solo Cello Suites - Suite No.5 In C Minor -Vi- Gigue
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001. Lennie Tristano - Lennie Tristano-The New Tristano - Line Up
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002. Lennie Tristano - Lennie Tristano-The New Tristano - Requiem
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003. Lennie Tristano - Lennie Tristano-The New Tristano - G Minor Complex
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Prochain voyage? Un maître d'un instrument moins souvent en vedette... Art Blakey est ma prochaine escale.
En parlant de "lumière", je ne sais pas si tu l'as fait exprès, mais c'est un pianiste aveugle, je n'ai pas osé l'évoquer dans mon texte, cela faisait trop bateau de s'extasier sur ce détail, n'empêche... Je profite de ma réponse pour ajouter que cela m'impressionne.
RépondreSupprimerEnfin chez moi pour te poser un petit comm' sur cet article.
RépondreSupprimerTristano, on en parle peu et il est assez peu prisé, y compris dans le milieu toujours très fermé des zicos de jazz...
Certainement cet intellectualisme qui le met en avant et qui doit en rebuter plus d'un.
Mais bon, finalement Brubeck, hein...
Aveugle...
Là aussi ça va te brouiller encore plus les pistes, la plupart des pianistes aveugles ont une approche particulière du clavier et des tonalités - en gros tu associes le "tout avec l'oreille" et le rapport de repères digitaux essentiellement en touches noires du clavier et tu as le côté inextricable de la chose.
Si tu observes les mains de Stevie Wonder sur son récent DVD, assez peu convainquant mais là n'est pas la question, tu remarqueras que ses pouces glissent sur la trame du clavier et que ses autres doigts cherchent le rapport touches noires et blanches (enfin cherchent..; pour lui, c'est trouvé depuis bien longtemps).
Si Tristano, en plus, a un référent contrapuntique associé à la technique jazz et ses modes d'usages, cela produit effectivement combiné à son approche sensorielle particulière un sacré mélange... et forcément un langage pas du tout "catégorisable"...
Cela le rend captivant et novateur à mon sens, mais franchement complexe à mettre en ligne de mentor ou autre artiste référent.
Certains l'ont fait, mais cela reste rare et il est vrai que, de temps à autre, le remettre comme tu le fais, en avant, est un sacrément bon rappel à l'ordre des choses.
Le jazz produit aussi des intellos, ou du moins étiquetés comme tels - certains le restent et ne font pas de grands émules, d'autres pourront, (comme Bill Evans, ou Brubeck par exemple) créer des lignées.
Tristano fait à mon sens partie de ceux ci - reste au temps de faire son chemin...
On a enfin digéré On The Corner de Miles - il faut laisser le temps au temps...
On a dans le monde des Bill Evans academy... heureusement que désormais il fait partie du patrimoine...
On ne se pose plus de questions sur Brubeck et on laisse Jarrett revisiter les standards tout en lui laissant patte blanche pour ses délires solistes - de plus en plus réfléchis et qu'on pourrait également ranger sur l'étagère intello...
Chez nous il y a le formidable Martial Solal, pas si loin finalement de Tristano - un monde "à part"...
Magnifique rappel.
Merci.
... et quel commentaire aussi. Oui, c'est vrai que les premières écoutes ne sont pas évidemment séduisantes. C'est aussi l'avantage de faire confiance. J'avais bien deux créations conseillées sous le coude, et j'ai suivi ce conseil qui avantageait comme entrée en matière ses prestations en publics, et ensuite par petite touche, ses compositions plus dépouillées. Jusqu'à une certaine révélation. J'en ai l’expérience maintenant et c'est aussi ma façon de lutter contre une tendance naturelle à écouter autre chose, de suite, sans patience.
SupprimerC'est pourquoi je n'oppose pas trop les blog, forums, avis de potes et avis de professionnelle. Avec de la passion et quelques clés je suis prêt à l'effort d'écoute, effort pas dans le sens douloureux mais dans le sens patience et temps pour enfin y trouver un plaisir.
Tristano a été un exemple parfait avec une récompense au bout.
Ensuite, seulement, je passe à autre chose. Au revoir Tristano....